Pathfinder
Pathfinder est une vidéo courte d’une minute, réalisée par Régine Cirotteau en 1999, dans laquelle est reconstitué en studio l’atterrissage de la sonde américaine éponyme sur le sol de Mars. Plongé dans la lumière torve du crépuscule martien, le spectateur découvre le sol chaotique de l’astre morne, au rendu cinématographique des plus crédibles. La caméra suit la trajectoire descendante de la sonde qui survole des étendues désolées marquées de cratères et de striures (témoignant d’une activité géologique intense dans le passé), dont la définition volontairement pauvre de l’image, brouillée, vacillante, accentue le caractère vériste. Le sol de Mars refait en carton-pâte d’atelier ressemble à s’y méprendre à celui des images réellement envoyées par la sonde américaine (…) Et l’on en vient à se demander si ce vrai sol de Mars, qui ressemble également si bien à un décor de science-fiction de série B américaine des années 1950, n’en serait pas quelque part un simulacre hollywoodo-platonicien ? (…) Mais tout serait pour le mieux dans le meilleur des mondes citationnels possibles, si Régine Cirotteau n’avait quelque peu compliqué cette affaire entendue. Tout d’abord, elle a ajouté à ses images un accompagnement musical strident, constitué par l’interprétation des premières mesures bien connues de l’Ouverture d’Ainsi parlait Zarathoustra de Richard Strauss, à l’aide d’instruments enfantins, tel l’inénarrable kazou permettant de transformer un maladroit fredonnement en une fanfare nasillarde frétillant dans l’huile d’une friteuse. Voici le grand tralala romantique coagulant le pathos nietzschéen de la force avec les singes mystiques de Stanley Kubrick… joué à tue-tête par une maternelle en délire ! Rien de tel pour vous foutre les retransmissions de Mars en l’air ! (…) Mais le plus gros du dynamitage vient à la fin du film. (…)
Extrait du texte No future dans un esprit jardin de Vincent Labaume, pour le livre monographique « Frisson synchronie » Filigranes éditions